Entretien avec Hugues de La Salle, président du club

Hugues nous confie ce qu’il aime dans l’enseignement du tir et ce qui fait d’EC700-Gajoubert, un club tout à fait particulier…

Hugues, qu’est ce qui t’a amené à enseigner le tir ?

A l’origine, c’est mon précédent métier. J’étais militaire. Mon rapport à l’arme était simple : un outil fait pour sauver des vies, en en enlevant le cas échéant. Donc son usage était sans ambiguïté. J’avais et j’ai toujours d’ailleurs conscience que la raison d’être d’une arme, c’est de tuer.

Par conséquent, lorsqu’en 2011 j’ai ouvert l’armurerie, il m’apparaissait inconcevable de vendre un tel objet sans proposer une solide formation à son usage, qui, il faut le dire, dès lors qu’il s’agit de tir de loisir, relève d’une déviance, mais dont nous ne pouvons que nous réjouir.
Et à Gajoubert, on laisse aux autres la liberté de se voiler la face sur le sujet.

Comment l’apprentissage du tir est-il lié à des valeurs ?

Je te remercie de me poser cette question, parce que c’est un sujet qui me passionne. Nous pourrions en parler des heures, mais pour faire simple et court, je résumerai en te disant que l’apprentissage du tir comporte plusieurs aspects, dont un primordial, celui de la sécurité.
Et la sécurité ne relève pas de technique mais bien d’un état d’esprit. Parce que devenir un tireur, je dirais même un détenteur d’arme « sûr », c’est accepter en conscience ce qui fait l’Humain : son caractère faillible. C’est l’acceptation de ce postulat de départ qui permet à tout à chacun d’adhérer aux règles et valeurs du vivre en société et, en ce qui nous concerne, de pratiquer son loisir de manière apaisée et sereine, en s’ouvrant à l’autre, sur le pas de tir.

A Gajoubert, nous prodiguons un cours sécurité, dont le contenu a été développé pour aider à cette prise de conscience. Il est obligatoire pour tous les postulants à l’adhésion mais également pour tous les invités. L’objectif de cette formation « gratuite » est de faire un tireur sûr, responsable et autonome. Elle est sanctionnée par un GO ou un NO GO. Seule l’obtention d’un GO autorise l’adhésion et/ou le tir en autonomie, c’est-à-dire sans la tutelle d’un encadrant.  

Hugues, j’aimerais que tu reviennes sur l’autonomie

Nos membres ont intégré et respectent les règles non négociables vues pendant le fameux cours obligatoire, et qui sont en quelque sorte, la « Constitution » de Gajoubert. Il s’agit de quatre règles de sécurité, plus une cinquième, le respect inconditionnel de la liberté d’expression. Ce cadre simple et accepté de tous, nous libère totalement. Chacun peut pratiquer le tir comme bon lui semble en totale autonomie dans ses choix et mouvements.

La société française, à force de règlementations et autres normes, est tombée dans le piège de l’infantilisation et de la déresponsabilisation. C’est devenu culturel. De mon point de vue, les autres clubs de tir n’ont pas su s’en extraire. C’est étouffant… quand tu en prends conscience.  Alors à Gajoubert, nous offrons une bulle d’oxygène. Et cela ne peut-être compris que si c’est vécu. Parce que sortir de ta culture, c’est sortir de ta zone de confort, ce n’est pas accessible à tout le monde sans un accompagnement bienveillant. C’est ce que les encadrants d’EC700 tâchent de mettre en œuvre.

Comment définis-tu le club ?

Je ne cesse d’être étonné par la bonne humeur, la complicité et la chaleur humaine qui règnent sur les pas de tir et lors de nos fameux barbecues !
Gajoubert c’est une ambiance.

Je suis fier et heureux d’avoir participé à la création d’un lieu où des gens très différents, de par leurs origines, leurs parcours, leurs métiers et leurs âges se rencontrent, s’écoutent avec tolérance et partagent des moments de vie.
A bien y réfléchir c’est une ambiance Républicaine.
Parce que le club de tir de Gajoubert c’est une magnifique communauté qui a fait siennes les valeurs portées par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, déclaration qui j’espère restera l’âme de notre République.

Je regrette que les valeurs Liberté, Egalité et Fraternité soient tellement mises à mal au quotidien. A Gajoubert nous préférons les faire vivre, et non sans provocation, j’aime dire que nous en sommes leur conservatoire.

                                                                              

Propos recueillis par Reine